Les cinq raisons pour lesquelles l'accalmie des cours du brut ne durera pas
1 - Des gisements de plus en plus chers à exploiter
Les 80 dollars par baril constituent désormais un prix plancher que ni les compagnies ni les pays producteurs ne souhaitent voir enfoncer. A cela une raison objective : avec la montée en puissance de projets complexes, comme l'exploitation des sables bitumineux du Canada, le coût marginal de production a littéralement explosé ces dernières années. Il avoisine aujourd'hui les 75 à 80 dollars par baril pour les pétroles les plus chers, alors qu'il dépassait rarement les 20 dollars il y a cinq ans. Une partie de l'offre serait donc détruite si les cours de l'or noir retombaient durablement sous ce seuil.
2 - Des capacités de production proches de la saturation
Rarement l'équilibre entre offre et demande de brut avait été aussi précaire. Pendant longtemps, les capacités de production excédentaires de l'Opep - qui assure à elle seule 40 % de l'approvisionnement mondial - ont permis d'absorber les chocs, en répondant presque en temps réel aux besoins des pays consommateurs. Cette flexibilité-là n'existe plus. Durant les années 1990, les capacités disponibles du cartel représentaient plus de 5 % de la consommation mondiale. Elles totalisent à ce jour environ 3 % de la demande. Faute d'un " matelas " suffisant, tout ce qui affecte l'offre risque donc, désormais, de se lire dans les prix.
3 - Des stocks de fioul insuffisants avant l'hiver
Un oeil sur les stocks, l'autre sur le thermomètre. Les experts pétroliers scrutent avec inquiétude l'évolution des réserves américaines. En particulier celles de " produits distillés ", qui englobent le fioul domestique. Un carburant clef à l'approche de l'hiver. Or, selon les chiffres publiés chaque semaine par le département américain de l'Energie, les stocks de " distillats " sont à des niveaux beaucoup trop bas pour la saison. Fin septembre, ils étaient inférieurs de près de 13 millions de barils à leur niveau de l'an dernier. Des tensions risquent d'apparaître assez vite en cas d'hiver très rude.
4 - A long terme, une offre appelée à plafonner
Les grands groupes pétroliers ne parviennent plus à faire croître l'offre de brut au même rythme que par le passé. La plupart d'entre eux voient même la production mondiale plafonner à 95 ou 100 millions de barils par jour à l'horizon 2020. Si les réserves sont de plus en plus compliquées à renouveler, c'est en premier lieu parce que les gisements les plus faciles à exploiter ont déjà été trouvés. Mais les difficultés sont aussi d'ordre géopolitique : désormais, les pays producteurs veillent jalousement sur leur sous-sol, et limitent l'accès des compagnies étrangères à leurs ressources.
5 - Une demande tirée par les pays émergents
Malgré le ralentissement économique, personne n'imagine un effondrement de la consommation de produits pétroliers en Chine, en Inde ou dans les pays du Moyen-Orient, principaux moteurs de la demande mondiale. Signe des temps : alors que beaucoup s'attendaient à un fléchissement durant l'été, les importations chinoises de pétrole ont encore augmenté de 7 % au mois d'août par rapport à l'année précédente. D'une façon générale, on sait que la consommation de pétrole en Chine devrait tripler dans les dix ans à venir. Un rythme a priori incompatible avec la croissance de l'offre mondiale sur la même période.